À travers l’ensemble de ses propositions, Carsten Höller décline une sorte de catalogue des sentiments et pulsions humaines : l’amour, le dévouement, l’amitié mais aussi l’égoïsme, l’envie, la cruauté. Sur la base ironique et brutale d’un des derniers tabous de notre société, l’infanticide, “Jenny” est le récit implacable de nos projections de meurtre et de sadisme à l’égard des enfants.
C’est ici le projet d’un seul homme (interprété par l’artiste lui-même) qui consiste à poser des pièges, empoisonner, tromper ou noyer des innocents. Un geste qui peut aussi se lire comme un questionnement ouvert des principes scientifiques de reproduction, où l’enfant se définit comme un véhicule à travers le temps et l’espace des gênes de ses parents. Sous une forme fragmentaire, Carsten Höller dégage avec ce film sans dénouement une sorte de méthodologie froide et regarde l’essentiel de notre représentation de l’enfance, en bref un monde protégé, inaliénable et intouchable fondé sur une croyance commune du devenir de l’homme, de sa survie et de son progrès.