«Montparnasse d'Eugène Deslaw est une réussite avant-gardiste, où l'oeil bascule en permanence, nourri d'insolite et de mouvement. Après avoir surpris la ville de nuit dans Les Nuits électriques (1928), le cinéaste biélorusse construit une valse rythmée, torsade ses plans dans les sinuosités de la capitale. Plans obliques, plongées déroutantes sur la fourmilière, vues qui glissent et se chassent. Le spectateur, pris d'un somnambulisme visuel, se laisse guider par l'euphorie des images. L'intertitre devient inutile. Deslaw balaie le quartier, ce qui en fait la vie et la misère, avec une minutie qui justifie cette succession d'esthétismes. Ombres et lumières sont arbitrées habilement et inondent les lignes brisées de tel ouvrage bétonné ou de cette cariatide au dessin sensuel. La caméra se promène entre les tables de La Rotonde et surprend une coquette saupoudrant un nez brillant ou un intellectuel, des révoltes pleines le crayon. On y devine Foujita, la clope élégante, ou Buñuel rêvassant devant des mollets qui dansent. Deslaw aime l'insolite: troupeaux de chèvres, hommes sandwiches, clowns et funambules, clochards, partagent le même périmètre. Ateliers d'artistes, foires et brocantes pavent les trottoirs et rappellent les plus belles heures du foyer intellectuel que fut Montmartre». Gael Le Bellego.